Un nouveau projet offre une vue panoramique des activités de soins de santé à l’échelle du CIUSSS
Pendant un instant, oubliez les soins de santé. Essayez plutôt d’imaginer le centre de contrôle de mission de la NASA, où des rangées de scientifiques et d’ingénieurs ont les yeux fixés sur leurs écrans au moment où une navette d’astronautes décolle vers la station spatiale internationale.
Grâce à une technologie numérique de pointe, les membres du personnel de la NASA peuvent consulter les données en temps réel, soit les signes vitaux des astronautes, la quantité de pression dans les propulseurs, la météo au site du lancement, la position de la station spatiale et beaucoup plus.
Tout aussi important, un logiciel prédictif peut les avertir de la présence de débris en orbite qui pourraient dériver dans la trajectoire de la navette. Et, si une possibilité de problème éventuel est décelée, la trajectoire de la navette peut être modifiée à temps pour éviter une collision.
Imaginez maintenant un centre nerveux très actif, c’est-à-dire le même concept, mais à plus petite échelle, qui surveille les activités complexes et les changements au sein d’un réseau de soins de santé, minute par minute.
C’est, en quelques mots, l’idée sur laquelle est fondé le nouveau centre de commandement du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal, mieux connu sous le nom de C4, qui se Concentre sur de meilleurs soins par le biais de Communication, de Collaboration et de Créativité.
En consultant les nombreux écrans réunis dans un lieu central du CIUSSS, les décideurs peuvent, par exemple, étudier comment les différents types d’usagers des soins de santé circulent au sein du réseau, cerner les goulets d’étranglement potentiels et s’assurer que certains usagers particuliers sont transférés sans heurt et rapidement d’une installation à une autre ou d’un Service à un autre.
Ici aussi, l’analyse prédictive joue un rôle crucial en permettant aux décideurs d’agir rapidement avant que les petits pépins d’aujourd’hui deviennent les problèmes importants de demain.
Bien que des centres de commandement semblables existent dans certains des systèmes de soins de santé les plus importants du continent, C4 est unique au Canada (voire même en Amérique du Nord), puisqu’il recueille et affiche des données relatives à un réseau de soins de santé intégré, réunissant de multiples installations supervisées par de multiples directions.
Plutôt que de surveiller les activités d’un seul hôpital, C4 suivra les activités complexes et interconnectées de cinq centres de soins de longue durée, de trois centres de réadaptation, de plusieurs CLSC et d’autres installations du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal.
Le soutien financier substantiel versé par la Fondation de l’HGJ en reconnaissance du rôle vital que le centre de commandement est appelé à jouer est d’une importance cruciale pour C4.
« En réunissant des représentants de nos différentes directions, et en demandant à ces derniers d’examiner et de réagir à un ensemble de données communes, nous pouvons élaborer une solution mieux coordonnée et plus efficace », explique Dan Gabay, directeur général adjoint du CIUSSS.
Par exemple, ajoute Monsieur Gabay, dans la plupart des organisations de soins de santé certains patients de niveau de soins alternatifs hospitalisés (connus sous l’acronyme NSA) présentent un défi particulier.
Ce sont ceux qui ne nécessitent plus de soins actifs, mais qui attendent d’être transférés vers un centre de réadaptation, un centre de soins de longue durée, qui ont besoin de soins à domicile ou d’aller dans une autre installation. Avant la pandémie de la COVID-19, il y avait toujours plus de 60 patients de cette catégorie à l’HGJ.
Grâce à l’information compilée et affichée dans le centre de commandement, le nombre de ces patients a diminué, de sorte que des lits d’hôpital dont nous avons un besoin urgent peuvent être utilisés pour des patients nécessitant des soins aigus.
En date du 15 février, il y avait seulement 22 patients NSA à l’HGJ, grâce aux efforts de Mary Lattas, directrice adjointe de la Réadaptation et des Services multidisciplinaires, et responsable du réseau des patients NSA. Pour faire baisser ce chiffre encore davantage, elle collabore étroitement avec les dirigeants cliniques à l’échelle du CIUSSS.
Un autre exemple est cité par Joanne Côté, directrice, Qualité, Innovation, Évaluation, Performance et Éthique clinique. En janvier, les dirigeants du CIUSSS savaient que le gouvernement autoriserait éventuellement l’Hôpital Catherine-Booth à recevoir des patients de réadaptation infectés par la COVID-19.
Plutôt que de simplement attendre l’annonce du ministère, les dirigeants ont utilisé le centre de commandement pour tenir compte de cette future désignation dans leurs plans généraux. Ainsi, les membres du personnel à l’Hôpital Catherine-Booth ont pu assumer plus facilement leurs nouvelles responsabilités le moment venu.
Madame Côté note également qu’il s’agit d’un véritable effort de pionnier, puisque la démarche C4 à l’échelle du réseau diffère profondément de celle des autres centres de commandement axés sur les hôpitaux. « Nous n’avons pas de modèle sur lequel nous fonder; par conséquent, nous précisons notre pensée au fur et à mesure que nous avançons », ajoute-t-elle.
Pour réaliser cette vision, le CIUSSS a encore une fois fait appel à son partenaire, la Société Maisha Labs, qui a fourni une expertise technique à différents projets au cours des dernières années.
Cette entreprise israélienne, qui a des bureaux à Tel-Aviv et à Montréal, aide les organisations à utiliser la technologie numérique de manière plus productive pour traiter les tâches plus exigeantes.
Avec l’appui de Maisha Labs et de son Équipe d’innovation, le CIUSSS a lancé une première version de C4 à la mi-décembre dans la salle du conseil de l’HGJ.
Des dirigeants de chaque spécialité clinique ont été réunis dans cette salle de ressources huit heures par jour, cinq jours par semaine pendant dix semaines consécutives afin de lutter contre la COVID-19. Les données que ces cadres supérieurs analysaient et utilisaient étaient affichées sur les nombreux écrans, allant des grands modèles muraux aux petits ordinateurs portables.
De plus, certains membres du personnel se réunissaient en petits groupes pour réviser certains types de données en particulier. Par exemple, la Dre Shannon Fraser, directrice médicale de C4, supervisait les brèves rencontres quotidiennes, qui avaient lieu à 8 h 40 et à 16 h, et portaient sur le nombre de lits à l’HGJ.
Son groupe comprenait le coordinateur du flux des lits ainsi que des représentants des Services de soins infirmiers, de prévention et contrôle des infections, de réadaptation, de santé mentale, de soins à domicile et de soins de longue durée.
« C’est un meilleur système parce qu’il nous permet d’être proactifs, plutôt que réactifs », dit la Dre Fraser, chef de la Chirurgie générale à l’HGJ. « Il s’agit d’un projet très élaboré, mais c’est la seule manière de maîtriser correctement le flux continuel de nouveaux renseignements dans un CIUSSS aussi vaste et compliqué que le nôtre ».
De plus, en décembre, un bureau satellite temporaire de l’environnement C4 a été aménagé dans la salle du conseil du Centre gériatrique Maimonides Donald Berman pour appuyer la prise de décisions au moment où les premiers résidents et les membres du personnel étaient sur le point de recevoir leur vaccin contre la COVID-19.
À la mi-février, quand les chiffres liés à la pandémie enregistraient une tendance à la baisse, la salle de contrôle de la COVID-19 a été démantelée et une grande partie du matériel a été transférée à l’établissement De La Montagne. Le Centre de commandement de la vaccination publique a été ouvert à cet endroit, sous la direction de Christine Touchette, directrice des Services de première ligne du CIUSSS.
La salle du conseil à l’HGJ continue d’être utilisée comme un site stratégique de C4, où les dirigeants du CIUSSS se réunissent régulièrement pour revoir les renseignements les plus récents et apporter les modifications nécessaires visant à faciliter le flux des usagers au sein du système de soins de santé. L’ouverture du site opérationnel de C4 est prévue en avril.
C4 est étroitement lié au concept de « Soins partout », la vision de santé numérique du Dr Lawrence Rosenberg, président-directeur général du CIUSSS. L’objectif de cette initiative est de prodiguer des soins où que soit le patient ou le client.
Dans cette optique, au cours des 18 prochains mois, C4 entend :
- optimiser la gestion de l’utilisation des lits à l’échelle du CIUSSS, à l’aide d’un algorithme AI permettant de prédire la durée de séjour des patients;
- améliorer la coordination de la trajectoire des soins de nombreux patients, dans tous les aspects de ces soins au sein du CIUSSS;
- accroître l’utilisation de la télésanté, le cas échéant, pour les patients qui peuvent être mieux servis par une visite virtuelle, tout en leur évitant une visite au Département de l’urgence;
- donner aux usagers des installations du CIUSSS un congé plus rapidement et de manière plus efficace.
Selon Amanda Babbitt, PDG de Maisha Health Systems, « C4 permettra également au CIUSSS de continuer à élargir le concept des salles d’hôpital virtuelles, composées de patients à domicile dont l’état de santé n’exige pas d’hospitalisation, mais qui doivent être suivis régulièrement en raison d’une maladie chronique (comme le diabète) ».
Madame Babbitt ajoute que C4 habilitera les professionnels à évaluer plus efficacement les patients où qu’ils se trouvent par le biais d’outils de surveillance à domicile, comme les montres intelligentes et les applications de téléphones intelligents. Le suivi des patients vulnérables pourrait rendre possible une intervention précoce et éviter une visite au Département de l’urgence ou une hospitalisation.
« L’environnement des soins de santé devient de plus en plus complexe », dit Monsieur Gabay, « et nous allions dans cette direction même avant la pandémie de la COVID-19. C’est la raison pour laquelle nous sommes d’accord avec le Dr Rosenberg pour dire que cette initiative est nécessaire ».
« C’est aussi pourquoi nous sommes aussi déterminés à créer un environnement de ressources suffisamment sophistiqué et souple pour nous aider à relever tout défi auquel nous pourrions être confrontés à l’avenir. »